L’économie Mondiale est au bord de la récession. Cette tendance de crise économique pousse bien souvent les investisseurs à se rapprocher des actifs de type valeur refuge. Est-ce déjà le cas?
2022 est définitivement une année à marquer d’une pierre noire. Après la pandémie, le monde a assisté à l'invasion de l'Ukraine par la Russie, entraînant une flambée des prix des matières premières, un choc pétrolier et une crise énergétique en Europe. L’inflation mondiale galopante avoisine les 10 % et la majeure partie des banques centrales s'engagent dans une voie monétaire agressive pour combattre la hausse des prix, au détriment d'une récession économique mondiale. Avec une vision peu claire tout au long de cette année en raison des vents contraires géopolitiques et systémiques majeurs, les investisseurs se sont déjà tournés vers des classes d'actifs considérées, dans une certaine mesure, comme des valeurs refuges telles que les bons du Trésor, l'or et le franc suisse. Suite au resserrement de la politique monétaire de la FED, le plus rapide des 35 dernières années aux Etats-Unis, le dollar américain a été l'actif sûr le plus recherché, renforçant son attractivité et maintenant le vieil adage : en cas de tempête, "le cash est roi" pour les investisseurs. D’ailleurs, l’indice du dollar qui compare sa valeur à un panier de principales devises a atteint son plus haut niveau depuis 20 ans. Tant que le dollar sera fort, le rebond des actions américaines et internationales sera limité.
Parmi ces valeurs refuges, l’or est très prisé par les investisseurs. Comment se porte le marché actuellement ? (un graph à l’appui et des chiffres sont les bienvenus)
Si l'or a conservé son éclat au début de l'invasion de l'Ukraine, le métal jaune a progressivement perdu de son attrait en raison de la hausse des taux d'intérêt mondiaux, les banques centrales et les investisseurs se concentrant désormais sur l’accélération de l’inflation mondiale "pas si transitoire". Comparé aux autres actifs traditionnels, l’or a perdu 9,62% depuis le début de l’année et 20% depuis son prix le plus haut. Cependant, l’or constitue une excellente protection en cas de crise géopolitique majeure avec la menace nucléaire dans le conflit ukrainien ou l’invasion militaire de Taiwan par la Chine, qui restent des scénarios pas si fictifs . Hors ces risques, l’or perd de son attrait lorsque les taux d’intérêt progressent. Le revirement de tendance se fera si les banquiers centraux se voient dans l’obligation de desserrer la politique monétaire, voire reprendre un programme de soutien, dans le cas d’une récession mondiale plus violente que prévu. Tout ceci va dépendre, en partie, de la rugosité de l’hiver en Europe et la poussée de l’inflation engendrée par la crise énergétique.
L’actif reste cependant parmi les plus défensifs vis-à-vis des actions et obligations.
Classe d'Actifs |
Performance depuis le début de l'année au 14 octobre 2022 |
L'Or |
-9.62% |
Obligations Mondiales |
-21.34% |
Actions du S&P 500 |
-24.82% |
MSCI Monde |
-26.46% |
Actions du Nasdaq |
-34.03% |
Bitcoin |
-58.84% |
Faudrait-il s’attendre à une hausse plus importante de l’or dans les semaines à venir ? Est-ce que le contexte inflationniste et les hausses des taux directeurs favorisent le placement au niveau de l’or ?
Dans le contexte actuel de hausse des taux, le marché d’obligations offre des rendements intéressants par rapport au métal précieux qui agit davantage comme un stabilisateur en période d'incertitude. Si l'on considère les indicateurs avancés, l'inflation commence à montrer les premiers signes de ralentissement. En effet, les prix des produits de base ont baissé depuis la mi-juin, tandis que les prix manufacturiers, les indices de pression de la chaîne d'approvisionnement et les prévisions d'inflation sont tous en baisse. Bien que la réduction de la production de 2 millions de barils par jour par l'OPEP+ en novembre ait été surprenante et qu'elle puisse soutenir plus longtemps la hausse des prix du pétrole, la tendance devra diminuer avec la baisse de la demande. Des lectures consécutives de l'inflation plus basses soutiendront une pause dans les politiques monétaires agressives, ce qui soutiendra les actions. Dans ce scénario, le sentiment de risque reviendra et ne sera toujours pas favorable à l'or. Les banques centrales devraient éventuellement pivoter sur leur trajectoire de hausse des taux au deuxième trimestre de 2023 et la baisse des taux qui s'ensuivra poussera probablement les investisseurs à délaisser les obligations au profit d'autres actifs comme l'or, qui pourra alors prendre de la valeur en raison de la correction subie cette année.
Quels sont les profils d’investisseurs davantage apte à se diriger vers ce marché ?
Si on regarde le graphique du cours de l'or, on constate un soutien dans la fourchette de 1 600 à 1 700 USD. Il pourrait s'agir d'un plancher pour cette année et, compte tenu des incertitudes concernant la crise de la dette en Europe, l'économie britannique en déclin, le risque d'une nouvelle escalade entre la Russie et l'Ukraine, qui pourrait entraîner les pays occidentaux dans la pagaille, et tout autre facteur exogène qui peut s’ajouter à 2022, le métal précieux a sa place dans les portefeuilles des investisseurs conservateurs.
Sur la Bourse de Maurice, le New Gold Issuer d’Absa a des performances en dent de scie sur une base Year-to-date. Comment expliquez-vous cela pour le contexte mauricien ?
Au niveau local, le NewGold ETF a attiré l'intérêt des investisseurs alors que la guerre en Ukraine s'intensifiait et que les pressions inflationnistes augmentaient. La performance de ce dernier reste quand même positive jusqu'à présent, à +2,90 %, contre -9,62 % pour l'or à l’internationale. La liquidité plus faible sur l'ETF et la dépréciation de la roupie face au dollar explique probablement la performance actuelle, vue que l’ETF détient des lingots d'or physiques. Par ailleurs, le secteur des loisirs et de l'hôtellerie s'étant bien redressé sur le marché domestique, le sentiment des investisseurs a été relativement positif, les flux de fonds et l'allocation des portefeuilles sortant des titres comme le NewGold et allant vers ce segment. Ce secteur clé de l’économie mauricienne est en hausse de +32% depuis le début de l'année.